Le Cas d’Alexandra*

*Cas Alexandra, cité avec l’autorisation de la patiente dans l’article ci-dessous :
Bénard N.V. Le motif de la « Caverne » dans le processus psychanalytique. // Psychothérapie-psychodynamique imaginative dans l’espace de la science et de la pratique modernes : recueil annuel basé sur les résultats de conférences et de séminaires ouverts. Premier numéro / Rédactrice en chef N. Bénard (Malakhova). – Krasnoïarsk : Centre scientifique et d’innovation, 2022. P. 200-219.
 
Un jour, une jeune femme que j’appellerai Alexandra m’écrit. Elle souhaite suivre une psychothérapie avec moi. Je lui demande de m’appeler pour discuter des possibilités et fixer un rendez-vous. Alexandra m’appelle pile à l’heure convenue… […]
Elle parle doucement, le timbre de sa voix est agréable, mais dès les premières minutes de la conversation, je suis frappée par son incroyable capacité à s’exprimer comme si elle s’excusait constamment, comme si elle était gênée de me distraire et de m’ennuyer avec ses problèmes. […]
Je lui demande qui m’a recommandé. Il s’avère que c’est son amie, qui étudie la psychologie et qui assiste à mes cours à l’université. Nous convenons d’un premier rendez-vous à mon cabinet.
Alexandra arrive à l’heure. Je vois une jeune fille de taille élancée ressemblant à une adolescente anguleuse, androgyne et ayant des difficultés à maitriser ses bras et ses jambes. […] Alexandra est habillée sobrement avec élégance mais avec un style unisexe : un pull, un jean, des bottes. Le tout dans des tons neutres de noir et de gris. Elle se comporte de manière hésitante, s’excusant constamment et demandant la permission. J’avais déjà remarqué ce point lors de notre conversation téléphonique et je m’y attendais… Elle est polie, amicale et semble malheureuse. Je me demande si elle a les ressources nécessaires pour supporter les frustrations et les changements liés au développement d’une thérapie. Cependant, elle veut comprendre ce qui lui arrive. A ce moment, je ressens le désir de l’aider et j’accepte de la prendre en thérapie.
Alexandra souffrait de multiples phobies… À la maison, elle ne cuisinait pratiquement pas, se contentant de thé et de biscuits. La nourriture lui semblait empoisonnée. Elle ne mangeait ni au café ni au restaurant pour la même raison. Chaque jour, elle allait dîner chez ses parents. Seuls les plats de sa mère lui plaisaient. Alexandra avait peur d’aller chez le médecin, car elle imaginait qu’on pourrait lui diagnostiquer une maladie mortelle. Elle avait aussi peur de voyager, de prendre le train, l’avion. Elle n’était jamais allée à l’étranger… Dans les endroits bondés, Alexandra était prise de vertiges et manquait de perdre connaissance… Elle souffrait de troubles psychosomatiques persistants. De temps à autre, elle avait des crises de névralgie, c’était la « lance » comme elle l’appelait. Elle décrivait cela ainsi : elle était en pleine forme, beaucoup de bonnes choses lui arrivaient, et soudain, le lendemain, la « lance » arrivait. Elle était allongée. Elle avait l’impression que quelque chose lui transperçait l’œil, elle avait mal à la tête et sa nuque était raide.
Tous les symptômes mentionnés ci-dessus se sont manifestés de manière assez aiguë chez elle lorsqu’elle a quitté ses parents pour un appartement en location. Cependant, elle souffrait de problèmes similaires depuis l’enfance.
Mais Alexandra n’a pas suivi de thérapie pour se débarrasser de ces problèmes. La demande était tout autre. La vie personnelle de la patiente était en difficulté, elle ne parvenait pas à nouer des relations qui la mèneraient au mariage et à la naissance d’enfants. C’était le problème qu’elle souhaitait résoudre. Au début de la thérapie, la patiente était en couple depuis plus de sept ans avec un homme marié et toxicomane. Il est intéressant de noter qu’il a épousé une autre femme au cours de leur relation… Une autre de ses demandes concernait l’épanouissement personnel. Elle avait du mal à faire des choix, se sentait dans une impasse dans tous les domaines, y compris dans ses relations et sa vie professionnelle. Dans ses activités professionnelles, elle s’est rapidement enflammée et s’est tout aussi vite refroidie, de sorte qu’elle ne pouvait avancer dans une seule direction, manquait de persévérance et de détermination. Elle voulait trouver sa vocation et s’épanouir, mais elle n’arrivait pas à faire de choix…

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